lundi, septembre 19, 2005

Kiss Kiss Bang Bang (Shane Black, 2005)

Si vous l'on vous dit que Kiss Kiss Bang Bang est un premier film, vous allez sûrement vous imaginer que son réalisateur Shane Black est un petit nouveau qui débute dans le milieu. Mais si le distributeur français a décidé de faire précéder le titre d'un mystérieux Shane Black's, au grand désarroi des caissières du cinéma qui ne comprennent pas pourquoi certains spectateurs demandent des places pour "Shane Black", c'est que le monsieur jouit d'une certaine réputation dans les cercles cinéphiles. En effet, Shane Black est avant tout scénariste et a donné ses lettres de noblesse au buddy movie, genre hollywoodien majeur de la fin des années 80.

Le script de L'Arme Fatale, relecture personnelle du mythe de Frankenstein, où le flic suicidaire incarné par Mel Gibson reprend goût à la vie au contact de son partenaire vieillissant Danny Glover entre deux séquences d'action, c'est lui. Le Dernier Samaritain, avec un Bruce Willis autodestructeur et d'une coolitude extrème, balancant régulièrement des punchlines définitives sur le cinéma hollywoodien, (influençant au passage un certain Quentin Tarantino, qui n'a jamais caché son attachement au film de Tony Scott), c'est encore lui. Last Action Hero, le chef-d'oeuvre sous-estimé de McTiernan, où le travail sur les rapports entre réalité et fiction deviennent carrément le sujet principal du film, c'est toujours lui.

Pourtant, depuis 1996, et le moins indispensable Au Revoir A Jamais (qui reste un sommet de la filmographie plutôt calamiteuse de Renny Harlin), l'homme semblait avoir disparu de la sphère hollywoodienne. Sorti d'un certain A.W.O.L., dont il a écrit le scénario, resté inédit dans les salles françaises pour de judicieuses raisons selon ceux qui ont vu le film, il aura donc fallu attendre une petite dizaine d'années pour qu'il effectue son come-back avec ce brillant Kiss Kiss Bang Bang.

Brillant par ses répliques, sa coolitude, sa narration et son travail sur le genre du film noir (chaque chapitre du film doit son nom à un livre de Raymond Chandler). Les acteurs semblent prendre un réel plaisir à jouer et l'on retiendra surtout la performance de Robert Downey Jr., plus souvent présent ces dernières années en une des tabloïds à cause de ses frasques qu'en haut des affiches de cinéma, et qui nous rappelle ici à quel point il peut être diablement bon.

Toutefois, Shane Black ne se contente pas de reprendre les formules qu'il a lui même créées, mais souhaite les dépasser en créant une distance par rapport au récit fictionnel, autrement dit une version post-moderne du buddy-movie, ce qu'il avait déjà amorcé dans Le Dernier Samaritain et mené de main de maître dans Last Action Hero. Le récit devient donc ambigu entre la manière sincère qu'il a de développer ses personnages, arrivant par moment à créer des réels moments d'émotion, pour tout d'un coup rebasculer dans la distanciation et la mise en abîme. Autre problème, depuis 1992, Tarantino a déjà dynamité les règles du film noir avec Reservoir Dogs et Pulp Fiction. Et c'est difficilement que le film de Shane Black passera dérrière lui auprès des spectateurs qui n'y verront probablement qu'une vaine tentative de copier l'original. Ironie tragique quand on sait combien le réalisateur de Kill Bill tient Black en haute estime.

Que tout cela ne vous empêche pas d'aller voir Kiss Kiss Bang Bang, un des films les plus réjouissants de l'année, qui vous fera sans aucun doute passer un très agréable moment.

1 commentaire:

Axel a dit…

Prosternons-nous devant Robert Downey Jr!
A chaque fois que je le vois, je jubile. Pourtant il n'a pas joué dans des films vraiment marquants, mais il n'y a aucun doute qu'il est l'un des acteurs les plus doués de sa génération (cf Chaplin).