lundi, février 20, 2006

Fauteuils d'orchestre (Daniele Thompson)

Le film de Danièle Thompson est l'excellente surprise de ce début d'année. D'une facture classique, sa force repose bien évidemment sur son casting impeccable, où tous les interprètes servent à merveille des personnages réussis. Et surtout, sur sa structure scénaristique.

Fraîchement débarquée de Macon, la jeune Jessica (Cécile De France) arrive dans la capitale avec l'envie, héritée de sa grand-mère (Suzanne Flon dans son ultime rôle) de cotoyer le grand monde. A la recherche d'un travail, elle arrive à se faire embaucher en renfort au Bar des Théâtres, dont le patron appréhende "la soirée du 17" au cours de laquelle auront lieu simultanément le concert du pianiste virtuose Jean-François Lefort (Albert Dupontel), la représentation d'une pièce de Feydeau avec Catherine Versen (Valérie Lemercier), actrice populaire de la télévision qui rêve d'incarner Simone de Beauvoir pour un célèbre metteur en scène américain, et la mise aux enchères de l'imposante collection de Jacques Grumberg (Claude Brasseur), qui souhaite tirer ainsi un trait sur tout un pan de sa vie.

Avec un tel sujet dans un tel microcosme, on était en droit de s'attend à un film intello réalisé par et pour des parisiens fortunés. Il n'en est rien. En développant de multiples intrigues, qui s'épousent chacune en d'habiles contrepoints, Danièle et Christopher Thompson (qui joue également dans le film) livrent un scénario choral extrèmement réussi, où chaque personnage réussit à exister. Il faut également saluer les excellentes prestations de chacun des comédiens qui sont tous plus justes les uns que les autres. Le scénario est une véritable partition, où les histoires de chacun se croisent et résonnent les unes par rapport aux autres, à la manière d'une musique orchestrale. On mentionnera notamment Albert Dupontel, qui nous ayant habitué à des personnages plus ou moins déjantés, insuffle une réelle identité à ce personnage de pianiste qui souhaite défaire la musique classique de son apparat luxueux afin de faire partager sa passion aux foules.

La vulgarisation de tous les arts semble d'ailleurs être l'enjeu du film, qui les traite tous de front (théatre, musique, peinture, sculpture) et de la même manière. Quand Jessica déclare devant Le Baiser de Brancusi que c'est une oeuvre qui donne envie d'être amoureux, Jacques lui répond que cette déclaration aurait fait plaisir au sculpteur. A travers cette réplique, c'est un des propos majeurs du film que de rappeler que l'Art est avant tout un reflet de la vie et ne doit pas seulement être uniquement perçu à travers un mode intellectuel, mais relève avant tout du ressenti.

C'est là que réside la grande force de ce film, qui évite l'écueil du poncif intellectuel, en nous invitant à partager la vie d'une communauté réellement touchante. Comme quoi rien n'empêche de mêler arts majeurs et divertissement populaire de manière réusssie.

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